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Le gouvernement mise sur le Corporate Venture


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Un dispositif fiscal incitatif permettrait aux entreprises d'abonder trois fois plus les start-up. Point sur la mesure encore en attente de son décret d'application par Lison Chouraki, commissaire aux comptes.

Après les institutionnels (via les FCPR) et le public (via les FCPI), une incitation est mise en place pour favoriser le corporate venture, financement des PME innovantes par les entreprises. L’article 15 de la loi de finances rectificative pour 2013 n° 2013-1279 du 29 décembre 2013, codifié à l’article 217 octies du CGI et modifié par l’article 76 de la loi de finances rectificative pour 2014, prévoit un amortissement exceptionnel sur 5 ans de toute somme investie dans une start-up ou un fonds de capital risque par des sociétés soumises à l'IS. La valeur des titres pouvant faire l’objet de l’amortissement exceptionnel ne doit pas dépasser 1 % du total de l’actif de la société réalisant l’investissement. Cette limite s’apprécie une fois pour toutes à la clôture de l’exercice au cours duquel a eu lieu la souscription.

Amortissement sur 5 ans

Pour une grande entreprise, prendre une participation dans des PME innovantes de son secteur est une bonne pratique qui permet d’explorer des pistes d’innovation plus ou moins risquées en ne finançant qu’une petite partie des coûts de R & D correspondants et, en cas de succès, de disposer d’un droit de préemption au cas où un concurrent souhaiterait acquérir une start-up. La possibilité d’amortir sur 5 ans les sommes investies peut rendre cette stratégie plus avantageuse qu’un projet de R & D interne bénéficiant du CIR, surtout lorsque le seuil de dépenses de 100 M€ est atteint et que celui-ci ne s’applique plus qu’au taux de 5 %. Pour la PME innovante, faire entrer dans son capital un partenaire industriel, par exemple un important client ou fournisseur, peut avoir des avantages mais aussi des inconvénients, c’est donc un choix à bien évaluer. D’un côté, une telle opération peut être le moyen de bénéficier de synergies, de s’adosser à une société plus forte, de préparer une éventuelle acquisition, etc. D’un autre côté, une prise de participation par un client peut dans certains cas faire fuir ses concurrents qui sont aussi des clients potentiels, peut créer des risques de conflit d’intérêt. De plus, la présence d’un industriel au capital peut dissuader certains capitaux-risqueurs craignant d’avoir des intérêts et une stratégie différente.

Investissements éligibles

Les investissements éligibles sont ceux effectués en numéraire dans des PME au sens de l’annexe 1 du règlement (UE) n° 651/2014 du 17 juin 2014 (voir nb ci-dessous), innovantes, qui ont leur siège dans un État membre de l'Union européenne ou dans un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales. Pour être qualifiée de PME innovante, l'entreprise devra justifier qu'au cours de l'un des trois derniers exercices précédent la souscription, ses dépenses de recherche ont représenté au moins 10 % de ses charges d'exploitation. Pour les entreprises nouvelles, les dépenses de recherche sont estimées pour l’exercice courant à la date de souscription et certifiées par un expert-comptable ou par un commissaire aux comptes.

Sont exclues du dispositif les entreprises cotées en bourse sur un marché réglementé. Les investissements dans les PME cotées sur Alternext sont éligibles. En outre, les entreprises en difficulté au sens des lignes directrices communautaire sont exclues du dispositif. Il s’agit :

- des sociétés à responsabilité limitée (SA, SARL, etc.) ayant perdu plus de la moitié du capital (dont plus du quart ayant été perdu au cours des douze derniers mois), ou

- des sociétés dont certains associés ont une responsabilité illimitée, lorsque plus de la moitié des fonds propres ont été perdus (dont plus du quart ayant été perdu au cours des douze derniers mois), ou

- des sociétés faisant l’objet d’une procédure collective d'insolvabilité (sauvegarde, redressement ou liquidation).

Les versements réalisés dans des PME innovantes sont plafonnés à 15 M€ par PME. Les lignes directrices ne semblant pas fixer de période au titre de laquelle ce plafond doit être apprécié, la PME éligible devra procéder à un suivi exhaustif des apports en fonds propres dont elle a pu bénéficier sur une sur une période non limitée dans le temps. Pour déterminer ce plafond, il est tenu compte de tous les versements soumis au régime d’exemption des aides d’état, dont notamment le dispositif de réduction ISF-PME.

Plafond de 20 %

L’investissement peut être réalisé en capital soit directement, soit par l'intermédiaire de certains organismes de placement collectif : FCPR, FPCI ou SCR respectant des conditions relatives à la composition de leur actif ainsi que par des fonds d'investissement situés dans un État membre de l'Union Européenne ou dans un État partie à l'accord sur l'Espace économique européen conventionné avec la France. Les fonds qui réalisent une opération secondaire sur une PME innovante au cours de leur période d'investissement doivent réaliser une opération primaire sur cette même PME, pour un montant au moins égal celui de l'opération secondaire.

Par ailleurs, les corporate ou entreprises "investisseurs" ne doivent pas détenir directement ou indirectement plus de 20 % du capital ou des droits de vote de la PME innovante. Ce plafond de 20 % s’apprécie globalement en cas de lien de dépendance entre plusieurs corporate. Cette condition doit être respectée de manière continue au cours de la période de l’amortissement exceptionnel.

Une nouvelle condition s’applique afin d’éviter tout effet d’aubaine. Les entreprises ou fonds possédant déjà des titres de la PME innovante et pour lesquels ils n'ont pas bénéficié de l'amortissement ne pourront pas amortir leurs nouvelles souscriptions. En pratique, cela signifie que seuls peuvent bénéficier de l’amortissement :

- le premier investissement réalisé par une société dans une PME innovante ;

- les investissements suivants lorsque la première souscription a donné lieu à un amortissement.

Avantage fiscal sous conditions

Durée de détention

La société souscriptrice doit conserver sa participation pendant au moins 2 ans pour l’octroi définitif de l’avantage fiscal.

Le texte prévoit une reprise de l’avantage fiscal en cas de non-respect des conditions ou bien en cas de cession de tout ou partie des participations dans les deux ans suivant l’acquisition. En pratique, le montant des amortissements indûment pratiqués est alors réintégré au bénéfice imposable de l’exercice de cession ou de l’exercice au cours duquel l’une des conditions cesse d’être respectée.

Modalités de taxation de la plus-value après deux ans de détention

La plus-value de cession est déterminée par différence entre le prix de cession et la valeur d’origine des titres, parts ou actions, diminuée des amortissements déjà constatés.

En cas d’investissement par l’intermédiaire d’un fonds, l’imposition au taux normal de l’IS, à hauteur de l’amortissement pratiqué, s’applique sur la différence constatée entre les sommes réparties par le fonds et les sommes versées par les souscripteurs, diminuées de l’amortissement pratiqué.

Constatation d’une moins-value

Dans le cas où la société souscriptrice réalise une moins-value lors de la cession ultérieure des titres, il n’est prévu aucun retraitement. L’amortissement est donc définitivement acquis.

L’entrée en vigueur de ce dispositif est subordonnée à sa validation par la Commission européenne. Il s’appliquera pour une durée de dix ans à compter d'une date fixée par décret qui devrait paraître au cours du 1er semestre 2015.

nb) Effectif <250 et CA<50M€ ou total bilan<43M€, seuils et effectif déterminés en fonction des notions d’entreprise autonome, partenaire ou liée.

Lire aussi : Guide de la jeune entreprise innovante, parue en février 2015, par Lison Chouraki. Préface de Xavier Niel. Collection Entrepreneurs. Paris, Dunod, 2015. 35 €.

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