Les chiffres étaient attendus par les professionnels du private equity qui, après une activité en berne en 2023, espéraient un signe de reprise. Le bilan établi par l'étude semestrielle de France Invest et Grant Thornton* fait finalement état d'un quasi statu quo. Comme au premier semestre 2023, aucune levée de plus de 1 Md€ n'a été enregistrée par les véhicules de private equity sur les six premiers mois de 2024. Les véhicules ont ainsi collecté 9,5 Md€, soit 900 M€ de plus par rapport à la même période l'an passé malgré une baisse par rapport à la moyenne de 11 Md€ observée chaque semestre entre 2018 et 2023. Une forte chute est notamment perçue dans le capital-innovation, où 41 véhicules ont levé 754 M€... presque moitié moins par rapport à l'an passé, où 1,4 Md€ avaient été collectés par 51 fonds.
Les particuliers en retrait
Fait marquant par rapport à 2023 : les engagements des acteurs du secteur public (principalement Bpifrance et la CDC), les fonds de fonds, et les assureurs sont en progression au S1 2024 (respectivement +77 %, +61 % et +31 % vs S1 2023) quand les personnes physiques et les family offices reculent de 13 % dans les montants alloués. Ils restent néanmoins la deuxième catégorie de souscripteurs derrière les fonds de fonds avec 2 Md€ engagés, soit plus de 20 % des souscriptions totales. Sur ce montant, 100 M€ ont été collectés par des véhicules d'investissement direct distribués en UC d'assurance-vie, et 102 M€ à travers des fonds « retail » ouverts au non-professionnels (FCPR, SCR, SAS...). « La conquête du retail ne se fera pas du jour au lendemain... Il faut le temps de structurer les produits, d'obtenir des agréments AMF, de référencer les produits, mais aussi de former les intermédiaires », analyse Bertrand Rambaud, président de France Invest. L'étude montre par ailleurs un retrait des investisseurs basés hors d'Europe, qui apportent 7 % des montants confiés (contre 16 % en moyenne sur les premiers semestres de ces six dernières années).
Des sorties moins nombreuses
En matière d'investissement, la peinture est - là aussi - quasi identique à celle de l'an passé. Quelque 10,6 Md€ ont été déployés dans 1 363 entreprises (vs 10,9 Md€ dans 1 349 en 2023). Ces investissements se sont - assez naturellement - détournés des biens & services de consommation pour davantage s'orienter dans l'industrie (27% des montants investis vs 21% au S1 2023). On observe, par ailleurs, un recul des transactions primaires. Celles-ci ne pèsent plus que 24 % des montants investis, contre 39 % au S1 2023. « Plusieurs gérants ont fait le choix de poursuivre leur chemin de création de valeur, corolaire de durées de détention qui se prolongent. Nous assistons à davantage d'opérations de soutien aux portefeuilles - notamment de réinvestissements pour accompagner des add-ons - que les années précédentes », analyse Bertrand Rambaud, faisant état d'une pratique précédemment plutôt cantonnée au venture. Un fort recul est enfin à constater du côté des sorties. Celles-ci ressortent en effet en baisse, avec quelque 585 exits enregistrées au premier semestre. Ce niveau n'avait jamais été enregistré - tout semestre confondu - ces dix dernières années. En montant, elles sont toutefois en hausse de 400 M€ pour atteindre 4,4 Md€. Le semestre à venir pourrait-il voir la machine se débloquer ? « Les six premiers mois de l'année ne sont pas les plus importants dans nos métiers, il y a une saisonnalité », estime en tout cas Bertrand Rambaud. Si le patron de Siparex voit en effet des mandats se signer, il déplore cependant toujours une asymétrie d'attentes de prix entre acheteurs et vendeurs, ainsi que des current tradings peu favorables dans certains secteurs...
*374 membres de France Invest ont été interrogés et 337 ont répondu.