Après un bilan en demi-teinte en 2023 - avec un montant total levé en recul de 46 % par rapport à 2022 et un retrait massif des investisseurs, mais une progression à la fois du nombre d'investisseurs et de deals pour l'Afrique francophone - 2024 témoigne d'une résilience de l’écosystème tech africain. Telle est la conclusion de Partech Africa, branche dédiée au continent du VC tricolore, dans son huitième rapport annuel, qui souligne que les start-up africaines ont collecté au total 3,1 Md€ (3,2 Md$) l'an dernier, les montants levés en equity restant stables à 2,1 Md€ (2,2 Md$). En termes de nombre de levées, on constate également un certain équilibre, avec 457 transactions enregistrées en fonds propres (-3 %) et 77 transactions en dette (+4 %). En dépit d'une diminution de 7 % en volume, l'écosystème tech résiste donc dans un contexte de ralentissement global au niveau mondial. Alors qu'il était en forte baisse en 2023, le nombre d'investisseurs recensés est d'ailleurs reparti à la hausse, pour atteindre 583 (+2 % du nombre d'investisseurs uniques en equity), porté par les tours d'amorçage. Le rapport met également en évidence une augmentation des méga deals (plus de 100 M$) : +43 % en volume et +57 % en montant levé entre 2023 et 2024.
Le peloton de tête voit le Nigeria reprendre sa place de numéro 1, qu'il avait cédée l'année précédente à l'Afrique du Sud. Le géant de l'Afrique s'impose à la fois en termes de montants réunis en fonds propres (499 M€, soit 520 M$) qu’en nombre d'opérations en equity (103). En deuxième position, on retrouve l'Afrique du Sud, avec 450 M€ (469 M$) levés, qui est toutefois devancé en volume de levées par l'Égypte (89 pour le pays des pharaons, contre 67 pour la nation arc-en-ciel), qui peut également se targuer d'avoir connu la croissance la plus rapide (+48 % en glissement annuel) en tours en equity. Vient ensuite le Kenya, qui conserve sa place dominante sur le segment de la dette (38 % du financement total de la dette et 31 % du nombre total d'opérations). Ces quatre pays forment un quatuor de tête quasiment indétrônable en apparence, mais dont la suprématie est néanmoins en recul : il a concentré 67 % des financements en 2024, contre 79 % en 2023. Le rapport révèle que le Ghana, le Maroc et la Tanzanie sont les seuls autres pays à dépasser le seuil de 50 M$ de fonds propres levés. En Afrique francophone, qui avait su tirer son épingle du jeu en 2023, le tableau est moins brillant : avec 220 M€ (229 M$), la région a connu dans son ensemble une chute de -31 % du financement en equity, accompagné par une diminution de 14 % en volume de deals. Ils représentent 55 % du volume total de financement en equity au sein du groupe élargi désigne « Reste de l'Afrique », contre 68 % l'année précédente. Ce qui ne doit pas faire oublier les performances de certains pays, à commencer par le Maroc, et à moindre mesure le Sénégal, la Côte d'Ivoire et le Rwanda - tous quatre figurent ainsi dans le top 10.
Qu'en est-il de la répartition sectorielle ? Cyril Collon, general partner chez Partech, commente : « L'écosystème africain du capital-risque reste résilient, même sans bénéficier (pour l'instant) de l'impulsion donnée par l'IA, qui représente désormais 30 % du financement mondial du capital-risque. Il est tiré par des secteurs clés, en particulier la fintech, qui continuent à aller de l'avant, démontrant la force de l'écosystème et de ses secteurs fondamentaux. » De fait, non seulement la fintech a monopolisé 60 % du total des financements en fonds propres, mais elle est en outre le seul secteur ayant progressé à la fois en volume d'opérations (+16 %) et de financement (+59 %), notamment grâce à quatre méga deals.
Si le bilan invite globalement à l'optimisme, les auteurs du rapport tempèrent leurs propos en mettant en exergue le ralentissement du flux de série A et B, l'allongement des délais de collecte de fonds et l'augmentation du nombre de tours d'extension. Partech Africa souligne par ailleurs une inversion de la dynamique entre les deux premiers trimestres, marqués par une croissance du nombre de transactions, et les troisième et quatrième trimestres, qui ont connu une diminution globale. Enfin, la parité hommes-femmes, qui avait légèrement progressé en 2023 (+4 % en equity avec 17 % du total investis, et + 3 points de pourcentage pour en total des transactions en equity), s'est détériorée l'an dernier, les jeunes pousses fondées par des femmes ayant obtenu une part nettement plus faible des transactions (18 %), ainsi que des financements (7 %), par rapport à 2023 - excepté dans le secteur de l'agritech, qui a enregistré les progrès les plus significatifs et atteint la parité en termes de financement.